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LA CHRONIQUE DE BERTRAND DUBOUX |
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Froome le Kikuyu en état d’apesanteur ! |
Il
n’aura fallu qu’une course de côte de 15 kilomètres sur les pentes
du col du Soudet, au lendemain du jour de repos, pour que Chris Froome
atomise le peloton du Tour de France ! Tous distancés, relégués,
déclassés, passés à la moulinette, adversaires et favoris compris.
Avec des écarts qui interpellent, comme au temps d’Armstrong
l’extra-terrestre. Le spectacle hallucinant d’un champion venu
d’ailleurs qui tournait les jambes à 110 tours/minutes, selon Cédric
Vasseur, observateur privilégié sur la moto de France Télévisions,
et qui s’est présenté en conquérant infaillible dans la station de
la Pierre-Saint-Martin. On
s’attendait à un final brutal, comme toujours après plus d’une
semaine sur les grands braquets. On a été servi au dela de toute
attente par l’envolée du maillot jaune en personne qui a terminé en
apothéose le travail de sape de ses équipiers, notamment Porte et
Geraint Thomas. Mais l’étonnement et la surprise sont venus de
l’affaissement général d’une opposition scotchée à la route,
sans aucune réaction. Comme si Froome le conquistador évoluait dans
une autre dimension. Talansky,
Bardet, Rui Costa, Pinot, Péraud, Frank, Uran, Nibali, Rodriguez,
Vuillermoz, Barguil, Contador, Valverde, Rolland, Van Garderen: il n’y
en avait pas un pour sauver les apparences, sauf le pugnace Colombien
Quintana, le dernier à résister et qui a préféré monter à ses
limites plutôt que de tenter de suivre Froome, au risque d’évoluer
dans la zone rouge et d’exploser. Sauf aussi le courageux Hollandais
Gesink, dont l’attaque après quelques kilomètres d’ascension,
n’aura pas eu l’effet escompté sur l’organistion de l’équipe Sky. J’avais
une certaine admiration pour Chris Froome mais il faudra quand même
qu’on m’explique un jour comment cet albatros décharné fait pour
se hisser à un tel rythme infernal vers les sommets en pulvérisant un
peloton composé des meilleurs coureurs au monde. Un peu comme le skieur
de fond allemand naturalisé espagnol Johann Mühlegg, triple champion
olympique aux JO de Salt Lake City, en 2002. Le premier jour, il avait
gagné les 30 km avec 1’30 d’avance sur le deuxième, alors que
chacun se battait pour une médaille à coups de secondes ! Il s’était
ensuite imposé sur 10 km (poursuite) et 50 km mais avait été contrôlé
positif à la darbepoetine,
substance qui augmente le nombre de glubules rouges dans le sang (proche
de l’EPO) et disqualifié. Après
dix jours de Tour, le constat est que Froome est au-dessus du lot,
magnifiquement soutenu par des équipiers qui ne le sont pas moins.
Comme au temps de l’US Postal.
Et dire que la lutte antidopage a fait des progrès depuis l’époque
Armstrong… Avec le passeport biologique et des contrôles répétés
qui doivent nous rassurer sur la probité des coureurs. Mais à voir évoluer
Froome et les siens, des questions se posent encore et toujours. Car on
sait que le Kenyan souffre de bilharziose, maladie tropicale parasitaire
quasiment incurable à cause de l’action d’un ver qui détruit les
globules rouges. Et il n’y a que l’EPO pour les reconstituer, d’où
notre scepticisme. Pour
une reprise, le bilan est lourd, très lourd, et le peloton du Tour aura
du mal à se remettre de ce coup de massue asséné par un maillot jaune
qui a défié les lois de l’apensanteur. Comme il l’avait fait sur
les pentes de La Planche des Belles Filles en 2012, d’Ax-3-Domaines et
du Mont Ventoux en 2013. Et comme il le fera là où il le décidera,
quand il le décidera ces deux prochaines semaines. Car le Tour n’en
est qu’à sa première étape de montagne ! Et après une telle démonstration,
il n’y a plus qu’un incident de course ou un accident, toujours
possible, pour le priver d’un nouveau triomphe à Paris. Bertrand
Duboux, 14.7.2015 Les Kikuyus sont un peuple d'Afrique de l'Est. C'est le groupe ethnique le plus nombreux du Kenya (6 622 576 lors du recensement de 20091).Les Kikuyus cultivent les montagnes centrales fertiles et sont également le groupe ethnique le plus économiquement actif au Kenya.Près de Nairobi, la bordure du pays kikuyu est encore jalonnée de plantations de café parfaitement agencées et de vastes demeures de pierre, aux toits de tuile. Peu d'espaces coloniaux ont été à ce point préservés, contrastant avec l'entassement humain de ce que l'on appelait il y a 40 ans les « réserves » ethniques.
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